L’enseignement et la recherche en droit à l’heure de l’open data et de ChatGPT

L’enseignement et la recherche en droit à l’heure de l’open data et de ChatGPT

"L'Ecole HEAD a été invitée à participer au colloque intitulé "L'Impact de l'IA et du Numérique dans l'Enseignement du Droit", qui s'est tenu le lundi 10 juin en Grand'Chambre de la Cour de Cassation. Cet événement a rassemblé des experts de divers domaines pour discuter des défis et des opportunités posés par les avancées technologiques dans l'éducation juridique.

Le colloque a été modéré par Bénédicte Boyer-Bévière, maître de conférences à l’Université Paris 8. Parmi les intervenants figuraient Juliette Barthélémy, chargée de l’emploi scientifique à la DRH de l'INRAE, Sophie Sontag Koenig, maître de conférences à l’Université Paris Nanterre, et Michel Séjean, professeur de droit privé et sciences criminelles à l’Université Sorbonne Paris Nord.

Le colloque s'est concentré sur les réflexions dues à l’implications de l'intelligence artificielle (IA) et du numérique dans l'enseignement du droit, explorant à la fois les défis et les opportunités. La question centrale était de savoir si les plateformes universitaires et les cours en ligne pourraient remplacer les enseignants-chercheurs, et si l'émergence de ces technologies marquerait la fin des méthodes d'enseignement traditionnelles.

Le débat a commencé par une réflexion sur le rôle crucial des échanges humains dans l'acquisition du savoir juridique. Les participants ont souligné que les interactions entre enseignants et étudiants sont indispensables pour développer une compréhension approfondie du droit. Les cours en ligne, bien qu'innovants et accessibles, ne peuvent pas entièrement remplacer les discussions et les débats qui se déroulent dans une salle de classe traditionnelle.

Un autre point abordé concernait la pertinence des exercices traditionnels tels que les commentaires d'arrêt et les dissertations dans l'enseignement du droit. Ces exercices sont essentiels pour cultiver l'esprit critique et l'analyse chez les étudiants. Toutefois, avec l'avènement des outils IA comme ChatGPT, la question de l'évaluation des travaux académiques se pose. Comment vérifier l'authenticité et la qualité des mémoires potentiellement rédigés par des IA ? Les enseignants ont désormais la responsabilité supplémentaire de détecter les biais et les erreurs dans les productions générées par l'IA.

Le colloque a également exploré la perception de l'IA par les enseignants et les étudiants. Tandis que certains voient le numérique comme une aide précieuse, d'autres y voient une contrainte. Une enquête menée auprès des étudiants de l'Université de Nanterre a révélé que l'utilisation de l'IA n'est pas aussi répandue qu'on pourrait le penser, bien que les outils numériques soient largement utilisés pour des tâches comme la recherche, la traduction et la création de contenu. Pour les enseignants, le défi réside dans l'intégration de ces outils tout en maintenant un niveau élevé de rigueur académique.

En outre, les participants ont discuté des risques associés à la dépendance numérique et à la pensée unique induite par des réponses basées sur des probabilités. L'IA générative, bien qu'impressionnante, n'a pas de véritable compréhension sémantique des mots qu'elle juxtapose. Cela peut conduire à des réponses erronées, mettant en lumière la nécessité d'une vérification rigoureuse et d'une approche critique de la part des utilisateurs.

Les données ouvertes, ou open data, ont été présentées comme une ressource précieuse pour la recherche et l'enseignement. Les données numériques produites par des acteurs publics et privés, disponibles sans restriction, peuvent être utilisées pour enrichir l'apprentissage et la recherche.

Le colloque a également souligné l'importance de former les étudiants à l'utilisation responsable de l'IA. Des séminaires méthodologiques sont nécessaires pour contextualiser les recherches et renforcer l'esprit critique. Cette formation doit commencer dès les premières années universitaires pour préparer les étudiants aux défis du numérique.

Enfin, les discussions ont porté sur les nouveaux métiers émergents liés à l'IA et à la sécurité des données. Il a été proposé de créer des cadres déontologiques et éventuellement des professions réglementées , comme un commissaire aux données, pour superviser l'utilisation éthique de l'IA. Les enseignants doivent également repenser leur rôle, non seulement en transmettant des connaissances, mais aussi en guidant les étudiants dans l'utilisation des outils numériques et en cultivant leur capacité à hiérarchiser et interpréter les informations de manière critique.

En conclusion, le colloque a mis en évidence que, bien que l'IA et le numérique offrent des opportunités considérables pour l'enseignement du droit, ils ne peuvent remplacer la dimension humaine de l'éducation. Les enseignants doivent adapter leurs méthodes pour intégrer ces outils tout en préservant les valeurs fondamentales de l'apprentissage critique et de l'échange intellectuel. Les étudiants, de leur côté, doivent être formés à utiliser ces technologies de manière responsable et efficace, préparant ainsi l'avenir de la profession juridique dans un monde de plus en plus numérique.

Si vous souhaitez accéder au colloque dans son intégralité vous pouvez le retrouver via le lien suivant : https://youtu.be/pQbxTqEwfuM"

par Maxime Lasmartes, étudiant de Bachelor 1, 2023-2024

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